L’histoire de l'esclavage | Moroccan Daily News

L’histoire de l'esclavage

L’histoire de l'esclavage 
Est celle des différentes formes prises par la condition sociale d'êtres humains privés par d'autres du droit de propriété sur eux-mêmes. Si l'esclavage est mentionné dans les premières civilisations écrites, les conditions de son émergence sont, en l'absence de sources, impossibles à déterminer avec précision. Le statut et la fonction de l'esclave ont varié selon les époques et les lieux : les sources et les justifications de l'esclavage, la position et les tâches matérielles conférées aux esclaves ainsi que les conditions de sortie de la condition d'esclaves sont autant d'éléments qui confèrent sa spécificité à chaque configuration historique. Cet article ne traite que de l'esclavage en Europe.
Au néolithique
L’anthropologue Alain Testart, dans sa revue des données historiographiques et ethnographiques sur les tombes multiplesau néolithique1, distingue plusieurs catégories dans les morts qui accompagnent le défunt : leurs épouses ou concubines, leurs serviteurs royaux, leurs compagnons de guerre, enfin les serviteurs et esclaves que l'on tuait pour suivre leur maître, ces derniers étant reconnus au fait qu'ils étaient jetés sans respect à côté d'un défunt enterré en décubitus latéral, souvent dans des fosses circulaires dispersées au sein de l'habitat2.
Dans les civilisations de l'Antiquité
L'esclavage existe à l'époque antique, il est mentionné dans les toutes premières traces écrites, comme le Code d'Hammourabi et d'autres écrits analysés comme des transcriptions d'histoires orales. Les critères de propriété liés à l’esclavage impliquent un certain niveau d’organisation des sociétés, ce qui rend incertaine l’existence de l’esclavage pour les temps préhistoriques. Les preuves sûres de l’existence de l’esclavage commencent avec les sociétés historiques possédant l’écriture, et peuvent être extrapolées, avec prudence, pour les civilisations protohistoriques qui les précèdent. Les déductions uniquement basées sur l’ampleur impressionnante de certains vestiges (pyramides, monuments, digues, etc.) restent conjecturales.
Pour Aristote, au point de départ, il y a la nature (φύσις) qui crée d’une part des êtres que leur intelligence destine à commander, d’autre part des êtres que leur seule force corporelle voue à l’obéissance ; en corollaire : tous deux, commandants et commandés, ont même intérêt3.
Ainsi, l'esclavage est la réduction d'une personne à un état de privation de toute liberté, celle-ci allant de libertés sociales aux libertés les plus fondamentales. L'esclave est exclu de la société tout en étant dans les sociétés esclavagistes un élément moteur.
Alexis de Tocqueville rappelle que « chez les anciens, l'esclave appartenait à la même race que son maître, et souvent il lui était supérieur en éducation et en lumières4. » Il donne l'exemple de certains artistes de l'Antiquité, comme le fabuliste grec Ésope(vie siècle av. J.-C.), qui étaient des esclaves affranchis. Le latin Térence (-184,-159) était esclave, ce qui étonne Diderot. Le philosophe grec Épictète (50, vers 130) était également esclave.
Au Moyen Âge
En Europe Occidentale
Sans qu'aucune vraie révolution ne soit opérée, l'influence grandissante du christianisme amène une diminution progressive de l'esclavage et renforce un mouvement de liberté en réalité entamé sous les empereurs païens de la Rome antique.
L'Église considère maîtres et esclaves comme des égaux devant Dieu, et s'oppose, en principe, à ce que des chrétiens appartiennent à d'autres chrétiens. L'esclave peut se marier, sa famille est reconnue.
Il a pu aussi, à certaines époques, se faire moine, trouver asile, et donc être soutenu contre son maître. À la fin de la Rome antique correspond donc, en Occident, le passage progressif de l'esclavage à une forme « adoucie », le servage, généralisé à partir du viiie siècle.
Ainsi, au viie siècle, la reine de France Bathilde, elle-même ancienne esclave et par la suite canonisée, aurait, selon la tradition, jugulé l'esclavage dans les royaumes francs en interdisant le commerce sur ses terres. Plus tard, Louis X le Hutin, roi de France, publie un édit le 3 juillet 1315 qui affirme que « selon le droit de nature, chacun doit naître franc ». Officiellement, depuis cette date, « le sol de France affranchit l'esclave qui le touche ».
Contrairement à l'esclave qui est bien meuble, le serf jouit d'une personnalité juridique. Tout d'abord, il n'appartient pas à son seigneur ; en outre, il possède des biens, peut ester et témoigner en justice, peut contracter (mariages, contrats de vente) plus ou moins librement. Sa condition de servage peut elle-même faire l'objet d'un contrat. Mais ce qui lie avant tout le serf à son seigneur c'est une obligation de stricte obéissance : il la lui doit comme dernier étage de la pyramide féodale. Ce devoir, comme tout lien féodal, a une contrepartie : le seigneur lui doit protection. Cela distingue les statuts du serf et du vilain.
Cependant, l'institution de l'esclavage subsiste tout au long du Moyen Âge. Plus ou moins disparu au nord des Alpes, le nombre d'esclaves augmente en Catalogne et particulièrement en Italie entre le xiiie et le xve siècle. Les grandes républiques maritimes de Gênes et de Venise sont les plus grands marchands d'esclaves à cette époque. Sont réduits en esclavage surtout des individus capturés au nord de la mer Noire, où la colonie génoise de Caffa représente la plaque tournante du trafic d'esclaves. Les esclaves mâles sont pour la plupart exportés vers l'Égypte mamelouk où ils constituent une ressource indispensable pour le recrutement de soldats, tandis que les femmes esclaves sont amenées en majorité en Italie et sur les grandes îles méditerranéennes (Crète, Sicile, Majorque, Chypre), où elles trouvent leur place dans le service domestique7.
Article détaillé : Servage.
De la Renaissance aux Lumières
Alors que l'esclavage recule en Europe du fait de l'extension du christianisme, sans toutefois disparaître, il prend son essor dans les colonies américaines. Auxvie siècle, des compagnies d’hommes de guerre espagnols faisaient le trafic des Amérindiens revendus à Cuba ou Hispaniola8. La Couronne espagnole hésita sur la position à tenir face à l'esclavage. D'un côté Isabelle la Catholique réprouvait l'esclavage, mais l'autorisait lorsqu'il s'agissait des Taïnos anthropophages9. L'esclavage était possible dans le cadre d’une « guerre juste »10.
Les bulles pontificales Sublimus Dei (29 mai 1537) et Veritas ipsa du pape Paul III (2 juin 1537) condamnent l'esclavage des Amérindiens11 ainsi que « toute mise en doute de la pleine humanité de ceux-ci », ou de « tout autre peuple qui pourrait être découvert dans l'avenir ».
Après la découverte de l'Amérique, les maladies ramenées involontairement par Espagnols et Portugais, ainsi que les maltraitances (travail forcé, encomienda), ont décimé les populations indigènes. D'après Claude Lévi-Strauss dans Tristes tropiques, des couvertures de varioleux furent même parfois abandonnées sciemment sur des arbres afin que les indigènes s'en vêtent et se contaminent. Pour remplacer cette main d'œuvre disparue, les conquistadors ont fait venir des captifs africains issus de la traite arabe. La traite négrière qui se généralise suite à la Controverse de Valladolid de 1550 et 1551, allait bientôt être pratiquée également par l'Europe.
Cette décision marque le début de la traite transatlantique. Les nations européennes, en particulier le Portugal, la France, la Hollande et l'Angleterre se lancent dans le commerce triangulaire entre des ports de l'Europe, le Golfe de Guinée et les Amériques (Brésil, Antilles). La motivation première des négriers est économique et l'esclave noir est considéré comme une marchandise, sous condition que ce ne soit pas sur le sol du royaume. Le pays ayant reçu le plus d'esclaves noirs est de loin le Brésil avec environ 5,5 millions d'Africains déportés du xvie siècle à 1850, soit 40 % du total12.
Anglais et Hollandais démarrèrent la Traite à peu près au même moment, dans la deuxième partie des années 1630, après l'avoir interdite jusque là.
L'Histoire du Pernambouc brésilien montre qu'il fallut cinq ans pour achever sa conquête, en 1635, au prix de la destruction d'une large partie des moulins à sucre, un bon tiers des portugais se repliant dans le sud13, selon le constat du chef de l'armée hollandaise, le polonais Christophe Arciszewski14. En 1635, les hollandais décident de mettre en place leur propre système de Traite négrière, une partie des planteurs portugais acceptant de coopérer. Dès 1637, une partie d'entre eux, menés par Peter Blower s'installent à la Barbade anglaise et y développent la culture du sucre.
La Barbade signe en quelques années un triomphe pour le sucre et pour la Traite négrière, suscitant des appétits dans les autres îles, dont la Martinique. Plus tard, alors que l'esclavagisme sur le continent américain atteint son rendement maximum au XVIIIe siècle, les philosophes des Lumières ébauchent la prise de conscience abolitionniste.
Esclavage au XXe siècle[modifier | modifier le code]
Article détaillé : Esclavage au XXe siècle.
Soit par survivance du phénomène esclavagiste traditionnel, soit à travers de nouvelles formes dites « modernes », l'esclavage est resté une réalité au xxe siècle. De nombreux comportements systématiques (camps de concentration ou de travailproxénétisme, domestiques dont les papiers sont confisqués…) ont ainsi progressivement été analysés comme de nouvelles formes d'esclavage.
Dans les colonies, les colonisateurs ont préféré astreindre les populations locales au travail forcé. Dans les faits, le travail forcé constituait souvent des conditions analogues pour les Africains à celles en vigueur dans les plantations : surexploitation, punitions corporelles, statut d'infériorité, répressions violentes pouvant aller jusqu'au meurtre, le tout sous la pression de l'impôt - ou des objectifs de production fixés par les métropoles - aux colons. Sous Léopold II une importante campagne d'information et de réprobation fut lancée au Royaume-Uni contre l'attitude des colons du Congo Belge (Zaïre). Mais il faut aussi rappeler qu'en arrivant sur ce territoire, les Belges avaient combattu et neutralisé les négriers arabes qui y opéraient depuis des siècles en accord avec les souverains indigènes.
En Union soviétique et en Chine (et autres pays communistes) règne la déportation brutale vers des camps de travaux forcés (Goulag ou Laogai) où l'individu est assujetti à un travail gratuit et dans des conditions qui l'écrasent, pouvant aller jusqu'à la mort. Parfois sa famille subit le même sort.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, les envahisseurs (Allemands et Japonais) et leurs dictatures militaires criminelles ont organisé l'esclavage de masse dans les pays conquis, et même en partie au sein des leurs, avec les détenus politiques issus de leur propre population. L'Allemagne nazie a exploité environ douze millions de personnes, principalement originaires de l'Europe de l'Est20, alors que le Japon shōwa en a exploité plus de dix-huit millions en Extrême-Orient21,22.
Ce quasi-esclavage poussé parfois jusqu'à l'extermination s'est exercé au sein de camps de travail, de camps de concentration et aussi de camps d'extermination spécialisés. Les cas de prostitution forcée sont aussi fréquents, particulièrement dans le cas du Japon shōwa qui enrôla environ 200 000 femmes de réconfort. Un exemple européen est celui du camp de Dora, où des prisonniers de guerre montaient des V2 jusqu'à épuisement de leurs forces et remplacement par de nouveaux prisonniers. La fabrication des V2 tua deux fois plus de personnes que les bombardements que ceux-ci effectuèrent. Wernher von Braun ne fut cependant pas inquiété.
Enfin, plusieurs pays anciennement colonisateurs, notamment des pays arabes, ont maintenu l'esclavage jusqu'au milieu du XXe siècle : Arabie saoudite et Omanmais également chez les Maures de certaines colonies françaises, en Mauritanie et au Soudan français, et ce malgré sa suppression officielle. La Mauritanie n'a supprimé l'esclavage des Haratins, noirs des oasis du Sahara, qu'en 1980. Aujourd'hui, l'esclavage traditionnel résiste dans de nombreux pays d'Afrique et d'Asie.
En Côte d'Ivoire, on nommait cependant « esclave » un jeune homme (souvent sénégalais) acheté à sa famille pauvre23, qui travaillait, mangeait et dormait avec les enfants d'une maison, mais qui à la différence de ceux-ci n'héritait pas.
Esclavage contemporain
L'esclavage n'a cependant pas totalement disparu dans certaines régions du monde, comme la péninsule arabique ou le sous-continent indien. L'Organisation internationale du travail (OIT) estime à vingt-cinq millions le nombre de personnes vivant actuellement dans des conditions assimilables à de l'esclavage, d'où le terme d' « esclavage moderne ». Selon l'ONU, chaque année, deux millions de personnes sont réduites en esclavage.
L'esclavage réapparaît actuellement au Soudan. Les Musulmans du nord ont rétabli la charia lors de la décolonisation et l'appliquent de force aux noirs chrétiens et animistes du sud qui se sont rebellés. Ceux-ci, repoussés dans la Province Équatoriale, la plus insalubre, ont résisté de leur mieux depuis l'indépendance. Aussi les forces gouvernementales ont-elles massacré les populations civiles de nombreux villages et continuent à y enlever de nombreux enfants pour les convertir à l'islam et les utiliser comme esclaves à Khartoum.
Dans les pays développés, par extension et suite à l'évolution des points de vue, le politiquement correct[non neutre] considère d'autres situations assimilables à de l'esclavage moderne :
·         le proxénétisme dont le tourisme sexuel24 ;
·         le travail clandestin ;
·         certaines conditions de travail (exemple : le travail des enfants).

En 2000, l'UNICEF estimait que deux cent mille enfants étaient retenus en esclavage en Afrique centrale et occidentale. D'après l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) quelque deux cent mille femmes et enfants sont victimes de l'esclavage. La pratique des enfants soldats peut également être assimilée à une forme d'esclavage, d'autant qu'à l'emprise psychologique mise en œuvre sur des enfants, s'ajoute la dépendance physiologique obtenue par l'usage de drogues fortes.

About hicham

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